Dans la grande histoire controversée des remakes , un film se démarque du lot , Les Infiltrés de Martin Scorcese .
Lauréat de plusieurs oscars , le film américain a été critiqué pour avoir pompé purement et simplement le film Hong Kongais Infernal Affairs sorti en 2002 .
Je vais tenter une comparaison objective dans cet article .
Comme à l'accoutumée , mon avis n'engage que moi et je n'ai pas la prétention d'être un spécialiste .
Pour être tout à fait honnête je n'ai vu Les Infiltrés pour la première fois qu'en 2010 , j'avais été captivé par le scénario du film , ignorant à l'époque qu'il s'agissait d'un remake .
Personnellement je trouve qu'il est très difficile de comparer les deux films tant la démarche et l'atmosphère qui se dégagent de l'un et de l'autre sont différentes .
Ils suivent cependant une trame similaire , à savoir la traque sans merci d'un policier infiltré dans la mafia et d'un gangster infiltré dans la police .
Nous avons d'une part , le premier volet d'une saga photographiant à la perfection l'évolution du Hong Kong des années 90 encore sous dominion britannique jusqu' à sa rétrocession à la Chine en 1997 et des conséquences sur la pègre locale.
D'autre part , un remake qui transpose l'action à Boston en nous plongeant dans la diaspora historique Irlandaise .
Scorcese et son scénariste William Monahan ne se sont pas simplement contentés de " pomper" le scénario d'Infernal Affairs pour en proposer une version hollywoodienne .
En effet , la ville de Boston n'a pas été choisie par hasard et le personnage de Frank Costello s'inspire du gangster irlandais James J. Bulger ( Jonnhy Depp l'interpretera dans le film Strictly Criminal ) .
L'héritage irlandais de Boston est présent tout le long du film que ce soit dans certains détails vestimentaires ( casquette plate typiquement irlandaises portée par l'acteur Mark Rolston ) jusque dans la bande son ; Je pense à la chanson I'm shipping up to Boston du groupe Dropckick Murphys .
Là où Infernal Affairs faisait preuve d'un certain lyrisme dans la mise en scène , Scorcese propose un film plus direct .
Je tiens à préciser également qu'à mon humble avis , si Infernal Affairs s'avère être un très grand film , il peut être encore plus apprécié dans son ensemble , à savoir en visionnant les trois films qui se complètent à la perfection .
De ce fait il est stérile de reprocher aux Infiltrés un manque d'ambition , dans la mesure où le film n'a pas été pensé comme une saga mais comme un seul et unique long métrage .
Un très long film , près de 2h25 , là où Infernal Affairs durait 1h40 .
Ce qui permet à Martin Scorcese de se faire plaisir avec un casting de " gueules" ; Leonardo Di Caprio , Matt Damon , Jack Nicholson , Martin Sheen Mark Walbergh...
Une distribution solide donc mais qui ne saurai tout de même faire oublier les performances de Tony Leung Chiu-wai et Andy Lau .
Nous retrouvons dans les Infiltrés tout ce qui fait la force du cinéma de Scorcese , des personnages charismatiques , un savoir faire technique irréprochable , une bande son pertinente et une violence graphique omniprésente .
Ce qui m'a un petit peu gêné sans rien enlever de mon intêret pour le film , c'est certaines séquences et dialogues un poil trop vulgaires .
Il est évident que sur ce point , Les Infiltrés dénote d'Infernal Affairs .
Mais dans l'ensemble , Les Infiltrés s'avère tout de même un très bon film .
La représentation citadine des deux films mérite qu'on s'y attarde .
Si dans Infernal Affairs les rencontres entre le policier infiltré et son supérieur ont souvent lieux dans des environnements épurés et aux larges espaces comme une séquence se déroulant sur le toit d'une tour donnant une vue sur la baie de Hong Kong et sa fôret , synonyme d'oxygène , le policier des Infiltrés rencontre ses supérieurs dans des lieux aux espaces clots et oppressants ( sous un pont par exemple ) .
Ainsi , là où le film Hongkongais brosse le portrait d'une ville tentaculaire où les protagonistes peuvent se confondre dans la masse , les personnages des Infiltrés semblent comme deux rats en cage enfermés dans un Boston carcéral .
J'ai un petit peu retrouvé cette idée de ville où l'on manque d'oxygène dans le film Enemy de Dennis Villeneuve sorti en 2013 .
Les plans d'Infernal Affairs s'avèrent très large , tandis que la caméra capte des plans très serrés dans les Infiltrés .
Si vous souhaitez avoir une analyse un peu plus poussée sur ce point , je vous recommande le livre Shanghai / Hong Kong , villes de cinéma écrit par Christophe Falin .
Je dirais que j'ai une petite préférence pour Infernal Affairs mais que cette préférence n'est pas motivée par un esprit snob de préférer l'original au remake , mais tout simplement car le film Hong Hongkongais s'inscrit dans un contexte géopolitique qui m'intéresse beaucoup et que la mise en scène , l'écriture des personnages me rappellent les grandes heures du polar hongkongais des années 70 et 80 .
Les Infiltrés fait partie des films que je prends plaisir à revoir .
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